Pourquoi Alstom arrête sa production de trains sur le site de Belfort ?

Fragilisé par une baisse des commandes en France, le constructeur ferroviaire Alstom a annoncé mercredi l’arrêt de sa production de trains à Belfort d’ici à 2018, une nouvelle qui touchera plus de 400 personnes, accueillie avec consternation sur le site historique du TGV. Le scénario tant redouté s’est finalement produit: face à une chute programmée de 30% de la charge de travail de ses usines françaises, Alstom a sacrifié un de ses sites d’assemblage, Belfort.

Une baisse importante des commandes sur le site de Belfort

« La direction d’Alstom a partagé un projet qui vise à recentrer ses activités exclusivement sur le service », soit la maintenance de trains, tandis que « les activités d’ingénierie et de production seront progressivement, sur une période de deux ans, transférées vers le site de Reichshoffen » (Bas-Rhin), a indiqué le groupe. Confronté à « la baisse des commandes et des projets d’investissement », Alstom explique qu’il « se devait d’adapter son outil industriel pour ne pas mettre l’ensemble des sites à risque ».

 « La charge du site de Belfort étant la plus impactée » par cette baisse, « la direction d’Alstom a partagé un projet qui vise à recentrer ses activités exclusivement sur le service » (maintenance des trains, ndlr), a indiqué le groupe.  Alstom explique que « la charge des 12 sites en France baissera de 30% d’ici 2018« , en raison de « la baisse des commandes et des projets d’investissement« , et qu’il « se devait d’adapter son outil industriel pour ne pas mettre l’ensemble des sites à risque« .

Les salariés « assomés » recevront des propositions

« Tous les salariés recevront, s’ils le souhaitent, une proposition de transfert » vers d’autres sites en France d’ici 2018, assure Alstom, qui n’évoque ni fermeture ni plan social pour l’usine de Belfort, où subsistera donc l’activité de maintenance. Ce scénario a été présenté à la mi-journée aux organisations syndicales.

Devant l’usine les employés sortaient au compte-gouttes, l’air assommé. « Pour l’instant, on n’arrive même pas à en parler. Il faut digérer l’annonce qui nous a été faite en 10 minutes », explique un employé qui refuse de donner son nom. Quant aux promesses de reclassement, « il y a plein de salariés qui ne sont pas mobiles », balaye-t-il. C’est « la fermeture ni plus ni moins de Belfort », explique Olivier Kohler, délégué CFDT du site. Selon lui, sur les 500 salariés actuels, seuls les 50 affectés à la maintenance des trains resteront. « Alstom fait une croix sur son établissement historique, où a été fabriquée la première motrice TGV« , a-t-il ajouté.

  • « Un vrai gâchis », regrette Claude Mandart, délégué central CFE-CGC, d’après qui il « ne resterait à Belfort qu’une centaine de personnes » d’ici à deux ans.

Inacceptable pour Pascal Novelin, délégué CGT du site. « La direction dit « On vous proposera quelque chose« . Est-ce qu’on va déraciner 450 familles ? », interroge le syndicaliste. « On défendra bec et ongles notre usine. Par la grève, par tous les moyens. On ne va pas se laisser faire mettre à la porte comme des moins-que-rien ».

Le député-maire (LR) de Belfort, Damien Meslot, s’est dit « consterné par cette décision qui menace directement près de 400 emplois à Belfort à l’horizon de deux ans«  et qui n’est selon lui « pas conforme aux engagements d’Alstom« . C’est la « démonstration » que l’« on n’a pas assuré la pérennité des sites industriels en France », avance le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger.

 D’autres usines inquiètes

 Installée depuis 1879 à Belfort, l’entreprise y a produit sa première locomotive à vapeur en 1880, avant de se développer dans les turbines et l’énergie, activité cédée à l’américain General Electric fin 2015. Un an plus tôt, les syndicats alertaient déjà sur des menaces de suppressions de postes dans la branche transports à Belfort. Et le carnet de commandes ne s’est pas rempli depuis, Alstom voyant même lui passer sous le nez un contrat de 44 locomotives diesel, achetées à son concurrent allemand Vossloh par Akiem, filiale de la SNCF et de la Deutsche Bank.

L’usine de Belfort n’avait plus que quelques locomotives à fabriquer pour la SNCF et l’Azerbaïdjan jusqu’en 2018, puis pour la Suisse jusqu’en 2021. Celle de Reichshoffen (1.000 salariés à ce jour), où sont assemblés les trains régionaux, n’a pas beaucoup plus de visibilité: la commande de 30 trains Intercités promise en février par le secrétaire d’Etat aux Transports, Alain Vidalies, n’a toujours pas été concrétisée. Dans un courrier à François Hollande mercredi, 13 parlementaires dont les circonscriptions accueillent des sites d’Alstom s’en inquiètent: « D’aucuns commencent à douter de la réalité de cette commande », écrivent-ils, espérant qu’il ne s’agissait pas d’un « mirage » pour « mieux faire accepter les autres annonces particulièrement pénalisantes ».

Le nouveau secrétaire d’Etat à l’Industrie, Christophe Sirugue, recevra le PDG d’Alstom, Henri Poupard-Lafarge, « le plus tôt possible » pour « veiller à ce que la mise en oeuvre du processus de transfert de l’activité soit exemplaire et que des engagements fermes soient pris », a assuré le ministère de l’Economie et des Finances.

(avec AFP)

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